Au Burundi, le général Nshimirimana, pilier du régime de Pierre Nkurunziza, a été tué, ce dimanche 2 août, dans une attaque à la roquette à Bujumbura. L’Union africaine se dit « horrifiée » et condamne « un acte barbare » susceptible de « déstabiliser un peu plus le Burundi, déjà dans une situation fragile ». Elle lance un appel au dialogue. Un événement qui fait craindre aux spécialistes et observateurs une escalade de la violence dans le pays.
Le général Nshimirimana circulait, dans sa voiture quand le véhicule a été attaqué à la roquette puis visé par des tirs d’arme automatique. Le bras droit du président Pierre Nkurunziza a été tué à Bujumbura, une semaine après l’annonce de la réélection du chef de l’Etat. Un assassinat ciblé qui a déjà suscité beaucoup de réactions.
Pour Thierry Vircoulon, directeur pour l’Afrique centrale de l’ONG International Crisis Group, les auteurs de cet assassinat, en ciblant Adolphe Nshimirimana, ex-directeur des services des renseignements et fidèle parmi les fidèles du président Pierre Nkurunziza, ont voulu adresser un message au chef de l’Etat. Cet assassinat est le signe que les élections ont approfondi la crise : « Depuis plusieurs mois, l’International Crisis Group tire la sonnette d’alarme sur la situation au Burundi en disant que la crise électorale va entraîner le Burundi dans une spirale de violence. Avec cet assassinat, c’est une étape supplémentaire qui est franchie dans cette spirale de violence. Mais les élections ont approfondi cette crise. La question principale des élections, c’était la candidature du président Nkurunziza. Le président Nkurunziza étant réélu, ça ne résout rien et ça ne fait qu’envoyer le message aux opposants qu’il n’y avait maintenant plus rien à négocier avec la conséquence que seul maintenant l’usage de la force pouvait sans doute changer les choses. Ce qui est au bout du chemin, c’est un nouveau conflit ».
Un message adressé à Pierre Nkurunziza
Une analyse que partage Christine Deslaurier, historienne à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), spécialiste du Burundi. Pour la chercheuse en frappant le général Adolphe Nshimirimana, les auteurs de l’assassinat ont frappé au cœur du pouvoir burundais : « C’était le symbole de ce qu’on a appelé un peu rapidement au Burundi « le système dd », c’est-à-dire un système brutal, corrompu, avec un certain nombre de personnalités qui ont réussi grâce au pouvoir des armes à l’époque, puis ensuite dans la négociation en tant que parti politique, puis au pouvoir, à se faire une toute-puissance vis-à-vis de la population des opposants etc. Donc, assassiner Adolphe Nshimirimana, c’est vraiment d’une certaine manière attaquer directement le pouvoir de Nkurunziza qui vient juste finalement d’être remis en place après l’élection. C’est vraiment dire, vous ne pourrez pas gouverner tranquillement. Et c’est un véritable coup de tonnerre dans un paysage politique et un climat politique qui était déjà extrêmement orageux ».
Et pour Christine Deslaurier encore, cet assassinat est un très mauvais signal sur la situation sécuritaire du pays : « La dernière fois qu’on avait assassiné comme ça une autre personnalité, un responsable des services de renseignements, c’était au tout début de la guerre civile, précisément en 93-94. C’était un assassinat de la même manière ciblé sur une personnalité qui représentait un peu tous les abus du pouvoir en fait ».