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Comme dans un film de série B, cette affaire met en scène un chef d’Etat africain, un ancien Premier ministre, une femme affairiste introduite au palais, un prince arabe et des mallettes de dollars. Digne d’une République bananière, le scénario dessine les contours d’un acte relevant de la criminalité financière internationale.
Tout est parti du voyage à Abu Dhabi du président guinéen, Alpha Condé, à la veille de la campagne électorale précédant l’élection présidentielle du 11 octobre. Ce déplacement pour le moins surprenant a été orchestré par l’homme d’affaires libanais Fadi Wazni, proche de Mohamed Alpha Condé, le fils du président, et Chantale Cole, une transfuge du régime de Lansana Conté connue pour ses deals financiers de toutes sortes. Si Alpha Condé s’est rendu à Abu Dhabi dans l’espoir de rencontrer des personnalités susceptibles de financer sa campagne électorale, il a été passablement déçu. La moisson financière n’a pas été à la hauteur de ses attentes.
Il a pu toutefois en revenir avec une bombe entre les mains. Au cours d’un dîner, Chantal Cole a en effet introduit un “prince” qui a confié au président: “M. le président, je voudrais me plaindre auprès de votre autorité. L’ancien Premier ministre de votre pays, Lansana Kouyaté, m’a escroqué. Il m’a délesté de 10 millions de dollars et de 500 ordinateurs. Voici les preuves de ce que je dis. Alors que je croyais bien faire, il a abusé de ma bonne foi. Ce Monsieur est une honte pour votre pays.”
Pareille confidence a fait l’effet d’un tonnerre. Alpha Condé, qui a demandé à son interlocuteur s’il pouvait soutenir publiquement cette accusation, s’est vu répondre par l’affirmative.
Le locataire de Sékhoutouréya s’est braqué. “Ne me parlez pas de cet escroc”, a-t-il commencé à répondre à ses proches lui suggérant un rapprochement politique avec Kouyaté en perspective de la présidentielle.
Nous avons interrogé Lansana Kouyaté au sujet de cette affaire. “J’ai eu effectivement vent de cette accusation grotesque, nous a-t-il répondu. Bien évidemment, elle est fausse. Elle a été montée de toutes pièces par Chantal Cole qui m’en veut mortellement depuis que je l’ai expulsée de la Guinée du fait de ses pratiques mafieuses.”
Ce plaidoyer pro domo suffit-il à le disculper ? Absolument pas, aux yeux d’Alpha Condé, connu pour son adversité tenace en politique, qui, aux dernières nouvelles, s’apprête à faire venir à Conakry l’accusateur afin qu’il tienne une conférence de presse et dépose sa plainte auprès de la justice.
Afin de voir plus clair dans cette affaire, nous sommes passés par une source bien introduite à Abu Dhabi pour retrouver le “prince arabe” en question. Il a accepté de nous parler et n’a pas été avare en révélations. Après quelques petits recoupements que nous nous imposons, nous reviendrons très bientôt, avec force détails, sur ce scandale d’Etat dans lequel un ancien Premier ministre de Guinée est mouillé jusqu’au cou.