Sur les traces de ses ancêtres
Descendante du roi Soumaoro Kanté, Mme Diabaté Djènè Kanté a certes réalisé son rêve celui d’appartenir à la grande famille des musiciens guinéens. Déjà à son actif, un album de dix titres. C’est dire que, Djènè s’offre une visibilité radicale avec IN N’NAFAN son premier album dédié à l’amour. Avec un timbre vocal captivant, l’artiste vole entre deux univers : le traditionnel et le modernisme. Mais le point d’orgue reste la tradition, ce foyer incandescent où Djènè s’inspire et cela grâce aux vertus de ses ancêtres et de ses parents qui ont été de grands maîtres de la musique traditionnelle dans son Karfamoryah à Kankan où elle a vu jour, il y’a 36 ans. Mariée et mère de cinq, dame Djènè entend jouer dans la cour des grands.
‘’Des obstacles sont nombreux mais pas infranchissables’’, martèle Djènè Kanté qui reconnait qu’il n’y a jamais rose sans épines. Alors engagée, l’artiste eut un nom dans son pays et hors de la Guinée. Dans ses chansons, elle retrace des faits historiques du Manding et de la vie quotidienne ; et cela n’a aucun secret pour sa mémoire. ‘‘J’ai passé une bonne partie de mon enfance à Karfamoryah où j’ai parcouru des autres villages avec mes parents pour animer les grandes cérémonies comme le mariage, le baptême, les fêtes de la Tabaski et de Ramadan. Au cours de ses déplacements, j’ai appris pas mal de choses sur l’histoire de mes ancêtres alors grand maître et des grands griots de l’époque’’. C’est pourquoi dans ses productions, Djènè s’est mélangé des rythmes modernes et de sonorités traditionnelles. Dynamique et disponible, elle veut s’arroser le titre d’’’Amazone’’ du Manding et battre le pavé pour la promotion de la musique traditionnelle. Battante à souhait donc une pionnière née, Djènè qui est à l’épreuve, n’entend pas s’arrêter à mi-chemin. A l’en croire, ‘‘je veux jouer dans la cour des grands’’.
Mais comment Djènè est venue à la musique ?
De la grande famille griotte de Kankan, la petite Djènè a commencé à chanter à l’âge de 15 ans sous la complicité de ses parents (Djely Kouman Kanté et Djéfadima Kouyaté) qui évoluaient dans un ensemble traditionnel de grande renommée à Kankan avec d’autres maîtres de la musique traditionnelle. Avec ses parents, Djènè écoutait et apprenait attentivement avec ses grands frères qui à la longue ont formé leur propre groupe. Et c’est alors que Djènè a pris de l’envol et s’est imposée. Malheureusement à 18ans, elle fut mariée par M. Diabaté. Et les contraintes du foyer freinent l’élan de Djènè. Qui, de par son comportement à l’égard de son époux, se remettra dans sa peau pour poursuivre son œuvre.
‘’Au départ, ça n’a pas été facile’’ dira dame Djènè qui avait besoin de soutien et d’appui substantiel. Dans son aventure, elle s’associe d’abord au groupe des frères Sékouba Kandia et autres pour se perfectionner davantage. Car son objectif, était d’évoluer en solo et sortir un album digne de nom. Alors au travail avec ses amis, Djènè va se frayer le chemin pour être au studio. Avec l’appui de Dr. Ousmane Kaba, fondateur de Koffi Annan, Djènè réussira à sortir son premier album, livré aux Guinéens, le 29 avril 2018 dans l’amphithéâtre de l’Université Koffi Annan. Un album de dix (10) titres qui a conquis le cœur des mélomanes et des grands musiciens des temps anciens. Sans compter que le titre phare IN’NAFAN qui porte d’ailleurs le nom de l’album a dérangé les amoureux. Après la dédicace de cet album, Djènè Kanté a eu aux honneurs de la part de grandes personnalités du pays et des musicologues guinéens. El hadj Souaré (homme d’affaires) promet de prendre en charge la scolarité des cinq enfants de Djènè Kanté dont deux (Amadou et Sona Diabaté) se trouvent à l’université : Karamo, Mariama et Djéfadima Diabaté évoluent au Lycée et à l’élémentaire. Des enfants qui orientent donc assistent inlassablement leur mère pour la réalisation de ses œuvres. Un apport inestimable doublé à celui de son manager Idy Bah.
Actuellement, Djènè prépare son deuxième album avec deux bons titres qui sont dans sa gibecière.
De rafraîchir la mémoire, Mme Diabaté ouvra une page historique de ses ancêtres en indexant particulièrement le roi Soumaoro Kanté qui joua personnellement son balafon mythique dans sa chambre sacrée. Un jour, c’est une personnalité de la famille Kouyaté (Balla Fasséké Kouyaté) qui a eu l’audace de jouer le balafon du roi. Depuis, poursuit Djènè, Soumaoro Kanté a compris qu’un chef doit toujours avoir un griot à ses côtés. Avec la tradition, on aussi comprit, le cousinage à plaisanterie qui existe entre les Kanté et les Kouyaté, explique Mme Diabaté qui devait rappeler que plus tard, ce balafon mythique reviendra à Soundjata Kéita qui l’a longtemps gardé jusqu’à sa mort. Cette histoire de Soumaoro Kanté et de Soundjata Kéita mais aussi de la famille Kouyaté (Griot des Kanté) doit être transmise aux générations actuelles pour mieux connaitre leurs ancêtres. ‘’C’est ce qui faisait d’ailleurs la fierté de nos parents qui prenaient tout leur temps à nous raconter cette belle histoire’’.
Ainsi à Kankan 1 et 2 existaient des ensembles traditionnels comme Ballakala qui rivalisait d’ardeur dans ce domaine. ‘‘Mon père, Djély Kouman Kanté avait la facilité de composer les chansons ; s’était un véritable génie qui savait aussi improviser’’. Djènè voudrait bien suivre les traces de ses ancêtres surtout de son père ‘‘ c’est pourquoi mes enfants ont adhéré non seulement à mon option et se sont engagés à m’aider pour être du haut du pavé. Car, ma vision est de faire la promotion de la musique traditionnelle. Aussi, jouer un rôle taillé sur mesure aux origines de la Guinée. Avec de la musique, Djènè voudrait traverser des frontières guinéennes pour rendre hommage aux patrimoines culturels guinéens avec l’appui de ses fans. Elle compte offrir des concerts en France et dans d’autres pays de l’Hexagone. Pour réussir ce pari, elle a surtout besoin du soutien de sa sœur M’Balou Kanté et de son cousin Mory Kanté, deux grandes figures emblématiques de la musique guinéenne.
Au titre de conseils, Djènè invite les jeunes musiciens et artistes guinéens à aller à la source pour apprendre la vraie histoire de la musique guinéenne très diversifiée. Par contre, elle condamne ces pirates qui découragent les musiciens à travers leurs recherches.
Comme idole, elle indexe Salif Kéita du Mali, très originel. ‘’Salif, c’est le meilleur des meilleurs. Et pour moi, Salif est une école et une source d’inspiration pour les jeunes artistes africains’’ a conclu Djènè Kanté qui encore, exhorte les artistes guinéens à transmettre le vrai message de leurs ancêtres.

BIS